LES CONSEQUENCES DOMMAGEABLES DE
L'USAGE : IMPACT DIRECT SUR LES FEMMES
La perpétuation de la discrimination en matière de nom facilite
l'oppression, la dévalorisation ,les violences envers les femmes.
Il leur est d’autant plus difficile d’y résister que cette discrimination
passe par une humiliation apparemment « petite », et même niée (voir
notre article sur le rire dans ce numéro). Et d’autant plus, que les femmes
visées sont souvent, effectivement, isolées et donc plus vulnérables.
- Dommage financier : dévalorisation des femmes
Dans le monde du travail, le terme "mademoiselle", avec ses
connotations infantilisantes est une contre publicité : éternelle junior,
jamais mature, jamais senior.
Il faut rapprocher cette pratique de celle qui consiste à
"oublier" les titres des femmes, ou à les appeler plus fréquemment
par leur prénom. (cf thème de la féminisation des noms de métier dans notre
prochain numéro).
On ne hèle plus un serveur en l'appelant "garçon !", on
continue a appeler la vendeuse "mademoiselle".
A 35 ans, un homme est 1er ministre à Moscou, à 32 ans, une députée
française est qualifiée de "bébé"[1]…A
cinquante ans on passe "mamie"[2],
trop vieille pour rester.
Trop jeune ou trop vieille, une femme n'est jamais normale, adulte, mûre…
Mme ou Mle ? : " c'est moi
qui pose les questions" dit le chef.
Le simple fait d’avoir à répondre à des questions, sans avoir l’occasion
de retourner la question simplement (poser la question « monsieur ou
mademoiseau » paraîtrait insultant ou ridicule…) place la femme ,
d’emblée, dans la situation de l’inférieure face à une autorité, à celui qui
s’autorise de la Loi pour interroger, mène ainsi la discussion etc…
A petits noms, petits salaires.
- Dommage physique : violence
Donner le droit de connaître une chose équivaut largement à donner le
pouvoir d’en disposer.
D’autre part, l'humiliation par le nom c'est la
stigmatisation, célibataire = sorcière. Or la stigmatisation justifie par
avance la persécution "la punition", de la personne qui a
"mérité" la stigmatisation, elle expose la personne stigmatisée à la
violence.
Anecdote : une discussion entre un locataire mauvais payeur, sa femme et
la propriétaire. La propriétaire est connue dans la localité comme « Mlle
untelle » (par la faute d’un notaire qui refusa d’inscrire
« madame »). Le ton monte, l’homme lance : « je vais te
niquer » et sa femme de renchérir que la « demoiselle » n’attend
que ça.
- Dommage physique et psychique : harcèlements sexuel ou moral
L'employeur disant « c’est bien Mlle ? Alors vous n’êtes toujours
pas mariée : je peux vous inviter à dîner ? » (fait réel) ne voit là aucun
harcèlement.»
Marie France Hirigoyen[3]
a bien montré que les harceleurs moraux se font un délice d'attaquer par un
moyen insidieux, non visible, facile à dénier.
Le procédé du "faux compliment" ou de la fausse politesse, de
la conformité scrupuleuse à une norme reconnue par tous, par le
"mlle", est un moyen idéal pour un pervers. L'allusion à la
"demoiselle", à la vieille fille et ses toiles d'araignée, est claire.
Il est tout à fait clair aussi qu'elle peut être aisément niée.
Dite à un pervers
qu'il vous humilie, il pourra se permettre de vous narguer en répondant "
vous allez vous plaindre de quoi ? d'avoir été appelée mademoiselle ?"
sous entendant sans le dire cette fois que vous passerez pour, ou que vous
êtes, folle.
[1] « La benjamine,
Emmanuelle Bouquillon, 32 ans, un enfant, député UDF de l’Aisne » Le
Revenue Français 20 décembre 1993.
[2] « Gilberte Beaux la Mamie de
l’Industrie » titrait un mensuel économique.
« Les filles de Golda. La « grand-mère
d’Israël « Edition spéciale "Pourquoi Edith Cresson" L’Express
17 mai 1991
[3] Marie France Hirigoyen le Harcèlement moral Syros 1998
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